Histoire Usine Alstom
ALSTOM TARBES à Séméac-Soues
Texte de Monsieur Bernard COMPAGNET
Pour les Hautes-Pyrénées , la seconde révolution industrielle fut celle de la houille blanche et de toutes les industries induites .
Sous l'impulsion de Jean Raoul Paul (Directeur des Chemins de fer du Midi de 1913 à 1931 ) les industries de matériel électrique , hydroélectrique et ferroviaire s'implantent dans les HautesPyrénées en début des années 1920 .
"Mr JR Paul rêvait en effet d'industrialiser la région pyrénéenne sur le modèle des Alpes, de transformer Tarbes en une seconde Grenoble ,tandis que Toulouse aurait tenu le rôle de Lyon. Tarbes et Bagnères-de-Bigorre connurent effectivement une poussée industrielle spectaculaire en 1920-1922, suscitant un bassin de 15 000 emplois, grâce aux commandes de la Compagnie des Chemins de fer du Midi".
Les Constructions électriques de France décident de construire une usine devant fabriquer des locomotives électriques à côté de la gare Ampérevielle (la ville d'Ampère !! la vocation de l'usine était donc bien électrique ); entre la voie ferrée Tarbes-Bagnères et l'Adour.
1921 . Création de l'usine par la société des Constructions Electriques de France.
Cette usine a pour vocation de fabriquer :
- des équipements pour centrales hydrauliques (turbines , régulateurs ,vannes et accessoires ,alternateurs ...).
- des locomotives électriques , diesel-électriques ,trolleybus , tramways , matériel pour chemin de fer .
L'usine des CEF représente l'une des plus remarquables réalisations industrielles dans la France de l'après Première Guerre mondiale. Avec ses grandes nefs en béton, ses ponts transbordeurs et ses ponts roulants de 75 et de 150 tonnes, l'usine fonctionne grâce à l'énergie électrique fournie à bon prix par la Cie du Midi. Dans l'esprit paternaliste du temps, pour loger leur personnel, les CEF construisent la cité Bois dans le village de Soues et la cité Pierre prés de l'usine jouxtant un parc des sports avec son fronton de pelote basque et ses terrains de Football / rugby.
1922 . Le lundi 30 Octobre 1922 à 11H00 le train inaugural du tronçon de la ligne Pau-Tarbes , tracté par la locomotive E4002 , première locomotive française circulant sous caténaire 1500V continu , marque un bref arrêt en gare de Tarbes avant une arrivée triomphale à l'usine CEF .A son bord , le ministre des travaux publics ( Yves Le Trocquer ) arrivé la veille à Pau et des nombreuses autres personnalités et journalistes .
Les discours prononcés lors de la visite de l'usine , célèbrent "la première locomotive électrique nationale" , les perspectives d'avenir et l'indépendance par rapport au charbon qu'apporte l'hydroélectricité des Pyrénées .
La locomotive a été construite en un temps record : le marché de la locomotive a été notifié par la Compagnie du Midi le 9 Juillet 1920 (marché de 50 Locomotives) . Construction de l'usine en 1921 et sortie de la première locomotive en Août 1922 ....Déjà une forte pression sur les délais .
1932 .Fusion de la CEF et d'ALSTHOM . A partir de cette date l'établissement portera le nom d'ALSTHOM (hormis durant la période 1939/1948 ).
"La société Alsthom est née en 1928 d'une fusion entre deux sociétés concurrentes, la Société alsacienne de constructions mécaniques et la filiale française du groupe Thomson-Houston, d'où l'appellation qui combine le «A L S » initial d'Alsace et le «T H O M » initial de Thomson. "
De 1921 à 1939 596 locomotives furent construites dans l'établissement de Soues-Séméac :
- 497 locomotives électriques .
- 53 Automotrices électriques .
- 8 Loco diesel-électriques .
- 27 Autorails diesel-électriques .
- 11 Locomotives industrielles .
Durant cette période l'effectif était de 1400 personnes dont 300 mensuels .En pointe il y a eu 1700 personnes en 1933 .75 à 80 % de l'activité était consacré à la fabrication de locomotives ( caisses , moteurs , bogies , appareillage et câblage ) . Le restant de l'activité concernait les turbines hydrauliques .
A la veille de la guerre ,Alsthom transfère ses fabrications de Traction à Belfort et d'appareillage à son usine de Lecourbe .
1939 . L'Alsthom vend son usine de Tarbes au Ministère de l'Air qui l'incorpore dans son programme de décentralisation d'usines aéronautiques en la spécialisant dans la fabrication des moteurs Hispano-Suiza .
L'activité des ateliers a été sérieusement perturbée durant les années de guerre , à la suite de l'enlèvement par l'occupant de la presque totalité des machines et installations .
Hispano-Suiza crée une école d'apprentissage . La formation est étalée sur 3 années :
- la première et la deuxième année→ Ajustage .
- la troisième année → Tournage , fraisage et ajustage .
Il y a 25 à 30 diplômés par cession durant la période Hispano-Suiza . Alsthom prendra ensuite le relai jusque dans les années 1970 pour former essentiellement des tourneurs et des fraiseurs .Cette formation permis également aux ouvriers spécialisé (OS) de devenir des ouvriers professionnels (P1) .
1944 . Le 15 avril 1944, les machines d'Hispano-Suiza étaient sabotées par le commando du capitaine Pottier, et le 25 mai, à l'arsenal, des employés, membres du corps franc Pomiès, faisaient sauter les rayeuses qui servaient à monter des canons 150 allemands. L'aviation anglaise n'eut pas à intervenir : Tarbes et sa banlieue étaient sauvées.
1944 / 1947 . Hispano-Suiza fait construire après quelques péripéties sur l'achat de terrains , la cité des cigognes . Ces 70 logements sont loués au personnel de l'usine .En 1953 ces maisons sont vendues de préférence aux occupants .
Au total , 380 familles sont logées à proximité dans les 3 cités édifiées .
1946 . Alsthom prend un bail pour 15 ans de son ancienne usine de Tarbes.
Après diverses transformations et agrandissements , plus de 50900 m2 sont couverts en 5 bâtiments principaux . Les effectifs s'élèvent à prés de 1450 personnes dont 49 ingénieurs et cadres . Un restaurant de 500 couverts , une infirmerie ,une crèche ("pouponnière"),une bibliothèque , colonie de vacances , maison de cure ,terrain de sports sont à la disposition du personnel ( gérés par le CE) .
Les activités sont orientées vers les quatre branches :
- Matériel électrique à courant continu(moteurs de traction ,moteurs industriels et spéciaux , équipements électriques ,blocs câblés ,disjoncteurs ,...).
- La chaudronnerie (locomotives , bogies ,charpentes de blocs ,...).
- Les moteurs diesel (40 moteurs par mois).
- La fonderie (fonte , aluminium en coquille ,cuivreux en coquille).
1957 . Une profonde réorganisation de la société est intervenue .La fabrication des moteurs industriels et spéciaux a été transférée à Belfort et l'usine de Tarbes a été divisée en 2 groupes indépendants :
- Le groupe Traction .(1213 personnes dont 793 ouvriers)
- Le département moteurs
- Le département appareillage
- Le groupe Diesel fonderie et laboratoire .(252 personnes dont 183 ouvriers)
- Le département diesel
- La fonderie et son laboratoire
Le groupe Traction était rattaché à la division Traction d'ALTHOM qui s'articulait alors ainsi:
- Au siège (Paris) les services généraux de direction et de gestion , les services commerciaux , les services d'études et bureaux de dessin.
- A Belfort et à Tarbes .Les 2 usines de fabrication .
1961 . Alsthom ,placé devant des nécessités impérieuses de regroupement de ses fabrications et de spécialisation de ses usines ,eut à faire un choix entre plusieurs options .La solution retenue fut celle qui prévoyait le maintien en activité et l'achat de l'usine de Tarbes aux Domaines (Mars 1961 ) ,malgré sa position géographique excentrée "Nous sommes à 800 Km de Paris , dans ce Midi qu'on se
représente volontiers comme turbulent" .
La direction parisienne d'Alsthom spécialisa Tarbes dans les seuls moteurs et appareillages électriques des locomotives, laissant à Belfort l'usinage des organes mécaniques et des caisses , ainsi que le montage complet des locomotives .
1962 .Dans le cadre de la réorganisation précédente , un nouveau bâtiment de bureaux en façade des ateliers de fabrication de moteur , fût construit . On l'appela "le Rocher Noir" .( 1000 m2 sur 2 étages).
La fabrication de moteurs diesel se développant , il a été décidé de construire dans la partie sud de l'usine un nouveau bâtiment d'usinage-montage .
1965 . Alsthom occupe 2 000 ouvriers, presque uniquement des hommes. La main- d'œuvre féminine, une centaine environ, n'a de place que dans l'atelier d'isolation électrique (plus de 20 Kilomètres de ruban isolant sont mis en oeuvre chaque jour) .Approximativement un « cadre » pour 30 ouvriers et un « collaborateur » pour quatre. 500 collaborateurs dans l'usine ( employés,
techniciens, dessinateurs et agents de maîtrise ) percevant une rémunération mensuelle. Quant à la masse des ouvriers, payée à l'heure, elle comprend sensiblement la moitié d'ouvriers qualifiés. Les ingénieurs qui animent ce personnel sont le plus souvent issus des Grandes Écoles, notamment de l'École supérieure d'électricité, des Écoles de Toulouse et de Grenoble, de l'École centrale, mais
surtout des Arts et Métiers. L'horaire hebdomadaire est de 47 h 30, en 5 journées de 9 h 30. L'établissement est sur 20 ha dont
5 couverts.
1968 . Un nouveau bâtiment de 4700m2 est réalisé pour la fabrication du département appareillage .
Le matériel fabriqué va du CABL de 15 gr au bloc appareillage de 6000 Kg , en passant par les disjoncteurs de 400 Kg .Ce bâtiment est doté d'un atelier de traitement des surfaces (cadmiage ,argenture , étamage , cuivrage ,...) .
Il faut également noter qu'une section électronique , née début 1961 est en cours de fort développement .
1969 . Construction d'un deuxième bâtiment de fabrication diesel et d'un corps de bâtiments de bureaux à deux niveau pour un total de 3200 m2 .
1970 . L'augmentation de l'activité Traction rend nécessaire le développement des fabrications de chaudronnerie . L'extension de l'usine ne pouvant se faire que dans la zone sud et celle-ci se trouvant hypothéquée par le projet de la rocade sud ( Autoroute ) , Alsthom est amenée à acquérir deux ensembles immobilier :
- les anciens Etablissements LOPEZ (fabricant des matériaux pré-fabriqués pour le bâtiment et les travaux public ).
- l'ancien domaine immobilier des Chaudronneries des Pyrénées .
L'usine est passée de 195 000 m2 à 322 000 m2
En 1973 la Chaudronnerie a un effectif de 250 personnes .Son atelier de 5400 m2 entièrement rénové produit 140 tonnes/mois :
- des éléments mécano-soudés pour Belfort et La Rochelle (châssis ,cabine de pilotage toitures intermédiaires.
- des charpentes (bloc appareillage) .
- des éléments mécano-soudés pour les arbres de moteurs de traction
1974 . Construction d'un nouveau bâtiment administratif ( Direction , comptabilité , médical , service du personnel (DRH) , gestion ) .
Avec un effectif de 2550 personnes et un parc d'un millier de machines-outils , l'usine Alsthom de Tarbes compte parmi les établissements les plus importants du Sud-Ouest .( 80 ingénieurs et cadres , 160 agents de maîtrise ,280 techniciens et dessinateurs , 230 personnels administratifs , 1800 ouvriers )
Années 70- 80 : Arrêt des activités industrielles, élargissement du périmètre d’expertise et recentrage vers le système de traction ferroviaire.
1975 . Arrêt de l'activité fonderie Fonte .
1978 . Arrêt de l'activité fonderie Aluminium .L'activité diesel est également arrêtée ,les moteurs en
Avril 1978 et les groupes électrogènes en Mai 1979 .
Durant cette période un atelier de fabrication de cartes électronique vit le jour . Ces travaux minutieux étaient réalisés essentiellement par du personnel féminin .
1980 . Transfert des groupes électrogènes chez Amann en région parisienne
1984 . Transfert des moteurs électriques vers Ornans . A partir de là , l'atelier immense des moteurs
fût un "désert" .
1986. En juillet 1986 le bureau d'études Appareillage est transféré de Paris(Tour Neptune à la Défense ) vers Tarbes .En novembre ce sont les études Blocs qui rejoignent Tarbes .
Années 90 à 2005 : Renforcement des capacités de conception, de développement et création d ’un laboratoire partagé sur l’intégration de puissance : PEARL
Une Réelle expertise électrique ferroviaire au service de nos Clients : TARBES = référence dans la maîtrise des systèmes embarqués
1987 . Essor important dans les convertisseurs de puissance . Pour fabriquer les nouveaux systèmes de commande des moteurs , une salle blanche classe 100 000 est nécessaire ( salle de 600 m2 dont la propreté est identique à celle nécessaire pour la fabrication des produits pharmaceutiques) .Cette salle est construite dans l'ancien bâtiment de la fonderie fonte!
En 1989 une seconde salle blanche de 200 m2 fut construite pour la maintenance des enceintes fréon ( système d'électronique de puissance immergé dans le fréon ) .
1990 . Les effectifs dépassent 1200 personnes , dont plus de 65 ingénieurs et cadres .L'usine fait
régulièrement appel à la sous-traitance locale .
Du 18 au 27 Mai 1990 GEC ALSTHOM TARBES participe à la cinquante troisième Foire-Exposition de la ville.
1993 . La direction de GEC Alsthom Transport décide de se réorganiser selon une logique de « produit ». Une partie des effectifs de Villeurbanne est alors mutée à Tarbes, où elle sera spécialisée dans les projets de locomotives et les TGV . Ingénieurs , cadres ou techniciens viennent renforcer de façon conséquente , le bureau d'études.
1998 . Sous la pression de la rude concurrence internationale , ALSTHOM demande à leur usine de se recentrer sur "leur cœur métier" . A Tarbes il est décidé d'externaliser les activités de la chaudronnerie , du service entretien , des expéditions , de l'archivage / tirage des plans et de ce qui restait du laboratoire avec sa métrologie .(de 1998 à 2000 ).
Pour Tarbes , le "cœur métier" se trouve dans la conception et fabrication (montage uniquement) des chaines de traction :
- Les coffres ou blocs d'équipements électrique .
- L'électronique de puissance .
- L'appareillage .
Le 18 Avril 1998 . Lors de la première journée Portes Ouvertes , 2000 personnes , parents ,amis ,partenaires ,personnalités ont pu découvrir les activités de l'établissement dans une ambiance conviviale et chaleureuse .
Le groupe ALSTOM entre en bourse .
Ce fut la plus grosse opération d'introduction en bourse d'une société européenne, en dehors des privatisations. Elle remporta un grand succès dans un climat d'euphorie boursière .
2001 . Les locaux d’Alstom abritent le laboratoire PEARL (Power Associated Research Laboratory) qui lui est étroitement associé dans la mise au point de convertisseurs de puissance pour le moteurs de train et la recherche des systèmes de propulsion du futur.
2007 / 2008 . Une Réelle expertise électrique ferroviaire au service de nos Clients .TARBES est une référence dans la maîtrise des systèmes embarqués Le 17 Mars 2007 deuxième journée Portes-Ouvertes pour l'établissement de Tarbes .200 volontaires
de l'usine ont permis à plus de 5000 personnes de découvrir que derrière les murs de cette usine historique se cachent des trésors de technologie , des savoir-faire très pointus et des salariés fiers de leur travail .
Les activités : De la Recherche et du Développement…
− Recherche sur le semi-conducteur et son environnement : Laboratoire PEARL
− Conception, validation des composants pour les systèmes de traction des matériels roulants :
Équipements de protection ou « appareillages » (disjoncteurs,contacteurs...)
convertisseurs de puissance (ou module de puissance)
Blocs et coffres de traction
− Standardisation des systèmes de traction pour les trains à très grande vitesse, locomotives, et trains régionaux
− Standardisation des composants électriques pour tous matériels roulants
A la Production et au Service après vente…
− Gestion de projets et fabrication de blocs de traction, de convertisseurs de
puissance, de l’appareillage
2010 . Activité recentrée sur la Recherche et Développement .
Effectif de 754 salariés, les opérateurs ne représentent plus que 21 % de l’effectif.( 37% administratifs et techniciens, 39% d'ingénieurs et de managers , 3% apprentis ).
En 2010, le parc industriel ALSTOM Sud est aménagé par le Grand Tarbes dans le cadre des mesures d’accompagnement de la restructuration de l’usine. Cet aménagement comprend la réalisation d’un restaurant inter entreprises, et d’un parc de stationnement .
2012 . Inauguration du nouveau site le 05 Avril 2012 .
Le site est passé de 31 à 8 hectares, avec une surface couverte ramenée de 8 à 3,5 hectares.
La construction de deux programmes immobiliers majeurs a été réalisée : un bâtiment administratif et ingénierie de 6 000 mètres carrés (répartis sur 3 niveaux) et un ensemble associant deux zones de production dédiées l’une aux modules et appareillages (2 800 mètres carrés) et l’autre aux chaînes de traction (3 600 mètres carrés), aménagées de part et d’autre d’un pôle logistique de 3 200 mètres carrés .Auquel il faut ajouter le réaménagement d’un bâtiment dédié à la plateforme d’essais et l’ancien bâtiment de direction pour accueillir les équipes de R&D.
Effectif de 680 salariés, les opérateurs ne représentent plus que 17% des effectifs. Le reste réparti entre ingénieurs, cadres et techniciens